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INVIDIAE MEDICI

1. LA FAIM DE L'IBIS ET LA SOIF DE TANTALE.

Le musée de l'Université Américaine possède une amulette, formée comme beaucoup d'amulettes syriennes, d'une feuille de bronze (fig. 1)* pourvue d'une bélière de suspension. Sur la face est gravé un grand échassier, attaché par le cou à une espèce de pilier placé derrière lui ; devant lui est un serpent ; au dessus de lui, la légende Le revers porte seulement l'inscription suivante :

Le dessin de cette amulette est si négligé, qu'il est impossible de reconnaître l'espèce du volatile qu'il représente, mais des monuments analogues, et plus soignés, montrent qu'il s'agit d'un ibis. Nous reproduisons ici (fig. 2) une petite intaille en pierre noire, dont il existe de nombreux exemplaires dans les collections (1), et qui représente cet oiseau, attaché par le cou comme le nôtre, à un pilier dans lequel on peut reconnaître le modèle du nôtre aussi. L'ibis étant un habitant de l'Égypte, et non de la Syrie, il faut croire que le prototype de notre talisman doit être cherché dans ce pays, dont la magie a submergé le monde romain à la fin du paganisme.

Ce groupe d'amulettes auquel nous venons de faire allusion n'a jamais été expliqué correctement. Tantôt on voit dans cet ibis l'ibis de Thot, l'ibis sacré (2); tantôt on y voit, au lieu d'un ibis, l'oiseau bennou, âme d'Osiris (3). La réalité est bien plus humble, et ces amulettes très populaires ne s'expliquent par aucune théologie.

L'ibis passait chez les anciens pour un redoutable ennemi du mauvais oeil Dans la fresque de S. Sisinnius, à Baouit, il plante son bec dans l'oeil ; il en fait de même sur une médaille talismanique; et il paraît bien être au nombre des protecteurs que mentionne un talisman de Beyrouth (4). Cette qualité ne lui venait pas seulement de ce qu'il avait un bec extrêmement pointu, mais encore de ce qu'il était l'ennemi-né des serpents, des scorpions, des sauterelles, de tous ces fléaux contre lesquels le fellah égyptien doit se tenir constamment en garde (5).Et de

Les dessins qui ornent cet article sont dûs au talent et aux soins très obligeants de Miss Day, que je prie d'agréer mes plus vifs remercîments.
* Les dessins qui ornent cet article sont dûs au talent et aux soins très obligeants de Miss Day, que je prie d'agréer mes plus vifs remercîments.
1 . Erman, Verzeichnis der âgyptischen Altertümer, 2. éd. p. 379, no 13611; Flinders Petrie, Amulets, no 135 1; Fossing, Catalogue of Antique Gems in the Thorvaldsen Museum, no 1873; Le Blant, 750 inscriptions de pierres gravées, no 234; Leipoldt, Religionen in der Umwelt des Christentums (Haas, Bilderatlas), no 77; etc. etc- Cf. Delatte, Musée belge, 18, 1914, 		    p. 67 s.; Déonna, Revue archéologique, 18, 1923, p. 135 s.
2 . Erman, cité plus haut, note 1; Leipoldt, cité ibid.
3 . Flinders Petrie, cité plus haut, note 1.
4 . Ces trois monuments reproduits et discutés. Perdrizet, Negotium perambulans in tenebris, p. 14; 27; 30; Perterson, P. 105 S.
5 . On trouvera l'analyse de tous les témoignages des anciens sur ce point, donnée par Thompson, A Glossary of Greek Birds, s.v.

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